jeudi 11 octobre 2007

Gredin de l'environnement : Pipo carburant

Les bio carburants n'ont de bio que le nom. Emanations de CO2, retour à l'agriculture intensive, déforestation, famine. Manque plus que la peste et le choléra. Mais ils peuvent pas, ils ont piscine.
Ca exitouille les éleveurs de blé, ça febrilise les betteraviers picards : ça y est, nous sommes à l'aube d'une nouvelle ère, une ère de pureté, de thune et de retour du productivisme agricole. Oubliées les difficultés de l'agriculture française, adieu les émanations de CO2, bye bye la flambée du prix des carburants... Miracle, peuple de France et de Navarre, prosternez vous devant le nouveau messie, le bio carburant arrive.
Cela fait déjà un certain temps que le mot est sur toutes les euro bouches, et déjà, les premiers véhicules sont en test dans certains de nos départements. C'est vrai que sur le papier, le principe est magnifique : faire du pétrole avec des plantes, si c'est pas écolo, ça. Manque plus que les sièges en fromage de chèvre et le volant en paille, et bientôt, exit le Paris-Dakar, vive le Paris-Katmandou. Le problème, c'est que dans les faits, les bio carburants, ça fout les boules en plomb transgénique avec des bras fluos qui poussent dans le dos. Et ça, c'est pas cool.

Bois ta caïpirinha et tais toi
Attention, ne vous méprenez pas, à la base, j'y croyais, ou du moins, je voulais y croire. Les bio carburants, ça ne date pas d'hier. Il y a une trentaine d'années, le Brésil, énorme producteur de canne à sucre, trouve le moyen de faire rouler ses premières voitures à l'éthanol. A la même époque, la France en est encore à se bourrer la gueule au volant. Eux ils en sont déjà à bourrer directement la gueule de leur voiture. C'est beau le progrès. C'est d'autant plus beau que le bio carburant est le symbole d'une nouvelle indépendance pour le pays, face aux pétroliers yankees. A tel point qu'au bout de quelques années, quand le Brésil fait appel au FMI pour faire face à une dette sur le point de devenir fosse-des-danaïdesques, ce dernier exige un retour en arrière et à la pompe US : "Jeune carioca, arrête de te prendre la tête, retourne danser le foro. Ton sucre, garde le pour la caïpirinha, et le pétrole, tu laisses ça aux grandes personnes". Forcément, moi, ça me le rend tout de suite beaucoup plus sympatique, le bio éthanol ! Depuis, l'essence de canne est revenu à fond la caisse au Brésil, Lula a même imposé un minimum de 30% d'ethanol dans tous les carburants du pays.
(Petite parenthèse technique : la canne à sucre, c'est bourré de sucre, d'où le nom. Si ça avait été bourré de petits canards pour le bain, le nom aurait été beaucoup moins pratique, et la production moins intéressante. Mais revenons à notre rhuma arrangé, ce qui est bien avec le sucre, c'est que ç'est bien pour faire de l'alcool. Et l'ethanol, justement, c'est de l'alcool. Fin de la parenthèse.)
Le problème c'est si on se dit que les biocarburants servent à autre chose qu'à faire chier les étasuniens et le FMI, ce qui, pourtant, est déjà pas mal. Déjà au Brésil, alors que la canne à sucre assure un très bon rendement en terme de production de carburant, il y a un léger souci. Production à très grande échelle = utilisation de pesticides et insecticides, produits, acheminés et répandus à base de, avec du ... ça commence par un p et ça finit par "étrole"... En plus, là bas, pour récolter, ils mettent le feu = co2, et, petit bonus charmant, moults maladies pulmonaires pour ceux qui récoltent. Enfin, les ouvriers agricoles sont payés au max 0,90 centimes d'euros par jour, ce qui, au Brésil ou ailleurs, s'appelle du semi-esclavagisme (c'est l'accent qui change).
-"Miss Scarlet, Miss Scarlet, m'a coupé le bras avec le sab'a'canne"
-"Ta gueule Pepito. On t'as déjà dit de finir ta caïpirinha et d'aller danser le foro".
Au final, le bilan écologique éthanol/essence est quasi le même. Sans compter, à la sortie du pot, l'émanation de toxines snobées par les produits pétroliers, considérées par de plus en plus de chercheurs comme ultra-cancérigènes.

Bio-FNSEA
Mais revenons en France. La canne à sucre, on en a pas, ou peu, dans les DOM TOM. Au mieux, c'est la betterave, sinon, c'est le maïs, voir le blé. Mais là, le rendement écologique est encore pire au niveau émanation de CO2. Et puis, pour produire en quantité, histoire de ne pas le faire que pour l'anecdote ou pour se la péter dans les colloques internationaux, l'Europe va devoir faire des choix, et sans doute renoncer à la jachère (et là, un petit merci à Hugues pour m'avoir signalé cet article du Monde). Super l'idée. Petit rappel au passage : les jachères ça sert à reposer la terre des intrants (pesticides et insecticides), mais aussi à lui permettre de retrouver sa fertilité, sa perméabilité... Donc pour faire du "bio" carburant, usons la terre à outrance, c'est pas grave, il suffit d'utiliser plus d'engrais ! Pour lutter contre le réchauffement, montez la clim' et laissez la porte du congel' ouverte. C'est tellement plus fun ! Avec la mode du retour aux bonnes vieilles valeurs des années 50, genre coup de pieds au cul dans les bahuts, et président réac', j'aurai du m'en douter : agriculture intensive, welcome back. La FNSEA, c'est l'avenir de l'écologie ! M'étonnerait pas que cela soit entériné par le Grenelle de l'environnement...

Bon je sais, tout ça c'est un peu déprimant. Alors histoire de se remettre l'alcool de patate avant de se quitter, rappelez vous que c'est pire ailleurs : en Indonésie les bio carburants sont en passe de devenir la première cause de déforestation. Et demain, ce sera encore mieux : avec 9 milliards de bouches à nourrir et une part de plus en plus importante des cultures consacrées à tout sauf à la production de céréales pour la bouffe, les africains, les asiat' (...), les gueux, quoi, ils seront encore plus maigres. Résultats, ils pourront rouler dans des toutes petites voitures, et seront beaucoup plus légers à transporter. D'où économie de carburant... Mais non, j'rigole, ils en consommeront pas, ils seront morts.

1 commentaire:

Anonyme a dit…
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